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Cuchaule au safran de Genève

19.00 CHF TTC

- 1 cuchaule bio de 500g au levain de panettone et safran de Genève (35.00 CHF TTC le kg)
- Livraison en vélo incluse (2.50 CHF TTC)
(dans les limites du canton de Genève)
- 1 sac compostable BioApply réutilisable dans votre poubelle verte inclus
Lors de cette troisième semaine spéciale viennoiserie, Levain tente de revisiter la recette traditionnelle de la cuchaule fribourgeoise.

Incontournable de la Bénichon (fête emblématique du canton de Fribourg), dont elle partage la tête d’affiche avec la moutarde du même nom, la cuchaule est reconnaissable de toute autre brioche par son mariage avec le safran. Flashback…

Nous sommes aux XVème siècle. Les épices, en tant que première marchandise mondiale, s’échangent déjà à prix d’or depuis bien deux millénaires. Parmi, elles, il en est une qui se distingue, d’une part, par sa culture très laborieuse qui en fait la plus précieuse, mais également par sa couleur, rouge vive à grenat, son odeur forte et sa saveur sucrée et très légèrement amère. Le safran.

Originaire de Crète (avant de s’étendre au Moyen-Orient et un peu partout dans le monde), cette épice nait de la fleur mauve d’un crocus à floraison automnale (que vous pourrez admirer sous peu au bord de la route de Compois à Meinier notamment). Il s’agit plus précisément des stigmates qui poussent entre les étamines de la plante et qui sont cueillis à la main avant d’être déshydratés (pour la conservation). La culture d’un kilo de safran nécessite à elle seule environ 200’000 fleurs. On comprend alors mieux son prix, qui pour ma part a varié entre 20 et 25.- le gramme…

Dans le même temps (toujours au XVème siècle), les boulangeries offrent pour la plupart du pain noir. Si la dégustation d’une brioche, bien que pauvre en matière grasse (la Suisse n’est alors pas la cour de Milan ou de Paris), devait déjà relever de la rareté, partager une même brioche parfumée au safran devait être réservé aux jours de fête. La réunion des deux produits peut donc ne sembler être qu’une bonne idée aujourd’hui, mais à l’époque, cela devait être une vraie révélation.

Revenons au siècle du changement climatique, voulez-vous ?

De mes dizaines d’essais estivaux, j’ai retenu que goûter la brioche sans en ressentir, franchement, la saveur de l’épice avait quelque chose de frustrant. Dès lors, au delà de sa texture ou des autres caractéristiques gustatives, il me semble évident que le secret d’une cuchaule réussie tient principalement à la présence du safran au nez et en bouche. Jeter maladroitement les stigmates en cours de pétrissage et s’en remettre à sa foi n’ayant donné qu’un maigre résultat, j’ai tenté plusieurs approches. Infusion dans la première pâte, puis la deuxième… dans les matières grasses (qui en théorie devrait retenir plus efficacement les saveurs après passage au four), telles que le beurre ou la crème entière. Mais au final, c’est Daniel Jauch, cultivateur à Meinier, qui me fit remarquer que l’infusion ne pouvait être réussie que si les stigmates étaient parfaitement réhydratés. Plutôt que le gras, il faudrait donc viser le liquide. Au final, je procède en trempant la totalité du safran dans le lait de la première et de la deuxième pâte pendant respectivement 48 et 60 heures (au frigo). Dernière petite astuce, je fais monter le lait à 35°C lors de l’inclusion du safran avant de le mélanger délicatement pour en faciliter l’absorption. Ainsi, la cuchaule (semble) nous révèle(r) sa flaveur safranée la plus intense.

Avant de vous donner la recette complète, je ne résiste pas au plaisir de vous faire un laïus sur l’Appellation d’Origine Protégée (AOP) qui défend l’utilisation du terme cuchaule. Car, oui, le simple fait d’utiliser son nom en pleines lettres dans ce billet, devrait me valoir au mieux la lecture désapprobatrice des certificateurs de ProCert, organisme sélectionné par l’interprofession de la cuchaule AOP, ou, au pire, une potentielle amende…

L’idée de l’AOP est de certifier aux consommateurs que TOUTES les étapes de la production, de la matière première jusqu’à l’élaboration du produit fini aient lieu dans la région définie (le canton de Fribourg en l’occurence)

« Ah ?! Donc cette fois-ci et malgré notre pouvoir d’achat, il n’est pas possible de faire migrer les ingrédients du monde entier pour déguster un produit élaboré qu’en dernier lieu sur nos terres ? »

Hum, c’est un poil plus compliqué que cela. Car en lisant le cahier des charges, je me suis aperçu que ni le safran, ni la levure ne faisaient partie de cette contrainte. C’est dommage, car l’un est responsable de l’odeur, de la couleur et du goût si particulier des cuchaules et l’autre de la qualité de sa fermentation, de sa pousse et participera activement à la durée de vie du produit. Difficile donc de réduire ces deux ingrédients à des rôles secondaires dans cette belle recette.

Par ailleurs, pour des questions de « tradition » la mouture du blé (c’est à dire le moulin) peut également provenir du village limitrophe vaudois de Granges-près-Marnand. N'est-il pas intéressant de noter que c’est dans ce lieu bucolique que se situe le Groupe Minoteries SA (un des plus gros producteurs de farine de Suisse).

Je plaide donc volontiers coupable de fabriquer ces cuchaules depuis notre petit bout du lac, mais j’aimerais préciser que le choix des épices s’est porté sur la culture de la cidrerie de Meinier et que le levain (et non la levure) utilisé ici est entretenu presque quotidiennement dans mon fournil. Chaque stigmate rouge de safran a donc été cueilli à la main locale et paysanne et la (très) longue (double) fermentation est initiée par une culture de bactéries et de levures naturelles inhérentes à la souche de ce levain.

J’ose croire donc à la clémence de nos administrateurs, qui s’ils se battent pour la protection d’un savoir-faire et d’une tradition locale, sauront deviner, que par ce billet, je diffuse moi-même l’information et la connaissance dont ils sont eux-mêmes les défenseurs.

Je me permets également un mot (ou plutôt rappel pour certains d'entre vous) au sujet du contenant, car il a fait l'objet d'une longue réflexion et d'une belle collaboration avec «URL:https://bioapply.com». Une brioche (ou n'importe quelle viennoiserie) sans un emballage hermétique ca sèche. Or, le champion toute catégorie à ce niveau c'est le plastique, mais à LEVAIN on en veut pas (et chez vous non plus je pense... ca fait grossir la poubelle encore plus vite). L'alternative a été trouvée avec les sacs compostables de BioApply. Après quelques tests pour trouver les plus efficaces, mon choix s'est porté sur un sac d'une épaisseur de 40 microns, qui d'une part permet à la brioche de se conserver de manière optimale (attention à bien fermer le sac quand même sinon ca ne marche pas) et d'être accepté dans les composts privés.
Merci donc de réutiliser le sac dans votre poubelle verte, afin de lui donner une deuxième vie et de lui permettre de réduire un peu son impact sur l'environnement.

Recette :

Première pâte, fermentation à 26°C pendant 12h

400 g Levain mature de panettone
960 g Farine T55 de blé bio, du Moulin Marion (FR)
40 g Gluten sec bio, du Moulin Marion (FR)
220 g Sucre de betterave bio (Allemagne), achat via www.biopartner.ch
250 g Oeufs entier de la ferme du Lignon (GE)
150 g Beurre bio de la laiterie Sapalet à la Rossinière (VD)
275 g Lait entier bio de la laiterie Sapalet à la Rossinière (VD)
0.7g Safran de la cidrerie de Meinier (GE)

Deuxième pâte, fermentation à 28°C pendant 6h

2.25 kg Première pâte
300 g Farine T55 de blé bio, du Moulin Marion (FR)
12 g Gluten sec bio, du Moulin Marion (FR)
30 g Sucre de betterave bio (Allemagne), achat via www.biopartner.ch
80 g Oeufs entier de la ferme du Lignon (GE)
105 g Beurre bio de la laiterie Sapalet à la Rossinière (VD)
230 g Lait entier bio de la laiterie Sapalet à la Rossinière (VD)
18 g Sel fin, Jurasel (CH)
0.7g Safran de la cidrerie de Meinier (GE)

Le levain de panettone

Si chaque souche de levain naturel possède sa propre identité, la population si particulière de levures et bactéries présente dans cette flore implique un travail rigoureux d'entretien et de rafraichis qui, s'il n'est pas exécuté correctement, dénaturerait le potentiel des ferments.
Alors que les fermentations traditionnelles sur levain implique une acidification des pâtes, il est fascinant de noter qu'en présence d'une certaine quantité de matière grasse et de sucre, la bactérie (lactobacillus sanfranciscensis) dominante à 99% du levain de panettone, est inhibée au profit des autres familles de bactéries et des levures, évitant ainsi la chute du PH qui donnerait une acidité désagréable aux produits.
L'entretien de cette souche (dont j'ai pu me procurer un bout à l'école internationale de boulangerie) se décompose en un cycle précis de rafraichis longs et courts.
Les rafraichis longs (généralement effectué la nuit) lors desquels une température proche de 18°C ainsi qu'un environnement anaérobique est privilégié pour favoriser la création d'acide acétique (par lactobacillus sanfranciscensis), qui prévient l'apparition de levures et bactéries étrangères.
Les rafraichis courts (généralement effectué le jour) lors desquels une température avoisinant les 30°C ainsi qu'un environnement aéorbique est privilégié pour favoriser le travail des levures sur celui des bactéries et préparer la souche pour le pétrissage d'une recette.
Après une étape de conservation au frigo, il faut compter au minimum 8 rafraichis (un long le soir l'avant veille suivi de 3 le lendemain, puis un autre long la veille au soir avant 3 derniers rafraichis le jour-j) avant la réalisation d'une recette. Ce planning de production extrêmement laborieux est la principale raison pour laquelle vous ne trouvez pratiquement pas de viennoiserie au levain aujourd'hui.
C'est dommage... car s'affranchir de la levure boulangère (saccharomyces cerevisiae - ethymologiquement "le champignon - myces, qui se nourrit de saccharose et qui est présent dans la bière - cerevisiae), sur ces produits, c'est, augmenter les durées de conservation, accroitre le moelleux et les prises de volume et surtout... permettre le développement d'arômes, que je qualifierais d'exotiques au nez et d'une rondeur incomparable en bouche. L'acidité est totalement absente, ainsi que l'odeur caractéristique de la levure boulangère (champignon).

Description du safran de Meinier par D. Jauch

Le safran trouve son origine dans une fleur, crocus sati virus en latin. Cette fleur de couleur violette, que vous découvrez à l’automne dans nos champs à Meinier, renferme des stigmates rouges qui sont utilisés couramment en cuisine. A la fois colorant et exhausteur de saveur, arôme soulignant une pointe d’amertume, le safran se présente sous forme de filaments. Notre culture locale est de qualité. La récolte se fait à la main pour une manipulation de la fleur exigeante. Les filaments sont extraits en douceur puis sont séchés pour qu’ils révèlent leur goût royal. Cette épice figure aujourd’hui sur la liste des produits labellisés GRTA.

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